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Recrutement des enseignants : formation au métier remise en cause

Publié le dimanche 8 juin 2008.


N. Sarkozy, le 2 juin 2008, a confirmé la refonte du recrutement des enseignants à partir de 2010.

Il n’a donné aucune précision sur le sort des Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), mais comme il invite les présidents d’universités à « développer une offre de formation diversifiée », on peut logiquement penser que leur existence sera remise en cause.

Les enseignants, du 1er comme du 2nd degré, seraient recrutés au niveau bac +5, soit celui du master 2 en France et master tout court en Europe dans le cadre de l’harmonisation des enseignements supérieurs.

Tout à sa com habituelle (qui y croit encore ?), Sarko promet une « revalorisation » du métier d’enseignant puisque l’embauche au niveau master permettra « de les payer plus cher en début de carrière ». Bien entendu, aucun dispositif précis n’est proposé …

Les universités pourraient intégrer à leurs masters disciplinaires des modules de préparation à l’enseignement et mettre sur pied des masters spécifiques. Ces derniers ne se substitueraient pas aux concours d’enseignement (Capes et agrégation pour le second degré, concours de professeur des écoles pour le premier degré), qui pourraient évoluer dans leur contenu.

Le candidat reçu à un concours serait directement affecté à un poste, sous réserve d’une titularisation définitive au bout d’un an. Une partie de son horaire serait accompagnée par des tuteurs, selon le principe du « compagnonnage ».

Encore une fois il s’agit de couper dans le budget de l’éducation : 23 000 stagiaires des IUFM (en 2007, 1er degré : 13 400, 2nd degré : 9 600) se retrouveraient directement devant des classes, et ce serait autant de salaires économisés par an (déjà 3 000 ont été supprimés cette année).

Mais pour le ministère il en va aussi de la vision réactionnaire d’un prof seul transmetteur de savoirs, ignorant toutes les recherches en pédagogie et didactique.

Certes les IUFM ne sont pas totalement satisfaisants, mais le choix de lancer un étudiant sans aucune préparation dans une classe conduirait à la reproduction de méthodes inadaptées … et surtout à des départs massifs d’enseignants dégoutés car très mal préparés aux réalités du métier.

Ci-dessous analyse par SUD Education, et rappel des 10 compétences que doit maîtriser un enseignant au sortir de sa formation initiale (rapport du HCE du 31/10/2006).

Sommaire 1re étape : la formation 2e étape : le recrutement 3e étape : pas de formation, pas de statut Les 10 compétences d’un enseignant au sortir de sa formation initiale Trois documents récents laissent percevoir quelles sont les orientations possibles du gouvernement quant à la disparition des statuts :

le rapport Pochard de janvier 2008 - Chapitre II.3, Comment recruter et former les enseignants, le rapport Geoffroy d’octobre 2007 sur L’intégration des IUFM au sein des universités, le texte de la conférence des directeurs d’IUFM de novembre 2007 intitulé Certification, formation, recrutement pour les métiers de l’enseignement. Il s’agit là de proposer des solutions radicales de transformation du système, dans le cadre affirmé d’une harmonisation européenne : objectif avoué, développer la concurrence.

1re étape : la formation Création d’un Master professionnel “Métiers de l’Education et de l’Enseignement” au sein des universités, dont la 5e année verrait les stagiaires - pardon, les étudiants - travailler à mi-temps pendant toute l’année dans les établissements scolaires, pour le plus grand bénéfice de l’Etat.

Il y aurait évidemment une sélection à l’entrée en Master (les directeurs d’IUFM proposent même une double sélection, à l’entrée en master 1 puis en master 2, histoire de bien développer le bachotage).

2e étape : le recrutement A minima, ils proposent d’alléger les concours, de créer des CAPES bivalents, voire polyvalents (suite logique du Master des métiers de l’enseignement !), de régionaliser les concours du Second degré.

Mais c’est encore insuffisant ! Le rapport Pochard est explicite : on pourrait se passer de tout concours et se contenter de l’établissement d’une liste d’enseignants à recruter par l’instance locale (Rectorat, IA, BEC, circonscription du 1er degré, ce n’est pas très précis) parmi les titulaires du Master, correspondant aux besoins (enfin, à leurs besoins !).

Ou même, troisième hypothèse, la possibilité que les titulaires du master fassent acte de candidature auprès des établissements et passent un entretien d’embauche. Il faudrait cependant, ajoute Pochard sans rire, fixer des règles nationales.

L’ouverture à la concurrence s’accentue puisque les ressortissants de l’UE, titulaires d’un Master, pourraient postuler aux postes d’enseignants en France.

Dans aucun de ces rapports, le mot fonctionnaire d’Etat n’apparaît : sous quel statut seraient recrutés les futurs collègues ? Probablement en CDI pour respecter l’harmonisation européenne.

3e étape : pas de formation, pas de statut Mais ce n’est pas assez, le rapport propose également le recrutement de “professeurs associés”, pour une durée limitée, éventuellement à temps partiel, et sans aucune condition de diplôme. Le développement de la précarité, il est vrai que le Ministère le connaît déjà…

Le rapport Pochard préconise la promotion de jeunes issus des zones difficiles, celles où les enseignants ne veulent pas rester, par l’attribution de bourses après la troisième : “On renforcerait ainsi le vivier d’enseignants issu de la promotion sociale et dont on peut espérer qu’ils constitueraient une population plus stable dans les académies fuies aujourd’hui par les néo-titulaires.” Belle perspective pour les jeunes des ghettos de s’y voir confiner dans le rôle de grands frères pompiers.

Même si le recrutement par concours est imparfait, il permet un traitement égal des candidats et garantit l’accès à la Fonction publique. Sud éducation, dans l’unité, appellera les personnels à se mobiliser devant toute remise en cause des statuts.

Commission fédérale Formation Initiale et Continue des Personnels, SUD Education

Les 10 compétences d’un enseignant au sortir de sa formation initiale 1 - Compétence disciplinaire et culturelle 2 - Compétence en langue française 3 - Compétence à concevoir son enseignement 4 - Compétence à prendre en compte la diversité des élèves 5 - Compétence à gérer la classe 6 - Compétence à évaluer les élèves 7 - Compétence en technologies de l’information et de la communication 8 - Compétence à travailler en équipe et à coopérer avec tous les partenaires de l’Ecole 9 - Compétence à réfléchir sur sa pratique, à innover, à se former 10 - Compétence à agir de façon éthique et responsable dans le cadre du service public de l’éducation

D’après le rapport du HCE « Recommandations pour la formation des maîtres »

Publié le jeudi 29 mai 2008 sundep