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Quelle réforme en lycée général et technologique en 2010 ?

Publié le lundi 31 août 2009.


réforme du lycée voulue par Darcos a capoté à l’automne sous la pression des enseignants et des lycées.

Son lycée « à la carte » visait principalement la réduction de moyens et risquait de déséquilibrer profondément ce cycle au détriment des élèves les plus faibles (suppression puis minoration de la voie technologique, choix des modules déterminant pour l’orientation mais peu transparent pour les non initiés). Il transformait le lycée en marché, ce qui aurait abaissé à terme la qualité des formations et dégradé les conditions de travail des enseignants.

Depuis, le gouvernement tente d’imposer la réforme par d’autres moyens. L. Chatel, le nouveau ministre, assure que « courant septembre, nous aurons construit l’architecture de ce nouveau lycée, qui entrera comme prévu en vigueur à la rentrée 2010. »

Les rapports Descoings (directeur de l’IEP Paris, conseiller du gouvernement) et Apparu (issu d’un groupe UMP de l’assemblée nationale) ont donc inventorier des pistes (voir analyse ci-dessous).

Si le premier alterne entre des constats et des suggestions relativement justes et des propositions plus dangereuses, le second reprend la vieille rengaine libérale d’une école inefficace et pas assez rentable.

Surtout, dans ces deux rapports, il n’est à aucun moment question de revenir sur les 49 400 postes d’enseignants supprimés de 2007 à 2010 (soit plus de 6 % des effectifs !), ni sur les 40.000 programmés d’ici 2012.

Par ailleurs le pouvoir veut « favoriser l’expérimentation » en attribuant à des lycées des moyens supplémentaires (?) et surtout la possibilité de définir d’autres règles de fonctionnement.

Dans le privé, nous sommes particulièrement concerné par ce contournement sans débat démocratique : pour E. de Labarre (secrétaire général de l’enseignement catholique), « 200 à 250 établissements catholiques vont expérimenter la réforme. »

Ces expérimentations visent pour beaucoup les enseignants qui doivent se plier à des modes d’organisation qui relèvent plus du marketing que de l’intérêt pédagogique : par exemple la mode de séquences de cours à 40 ou 50 minutes est à nouveau avancée …

Sommaire Les moyens Rééquilibrage des voies et des filières Orientation et insertion professionnelle Redéfinition du statut des enseignants : temps de travail et des missions L’autonomie des établissements Analyse des rapports Descoings et Apparu d’après un document de Sud Education

Les moyens Si le rapport Descoings mentionne de nombreuses initiatives qui pourraient être intéressantes (ateliers, personnels référents pour les élèves, formation continue des enseignants, travail interdisciplinaires, stages, voyages, activités culturelles, etc.), il n’est jamais fait mention de moyens supplémentaires.

D’ailleurs, la seule mention de moyens dans tout le rapport concerne la diminution des effectifs en seconde dans les établissements difficiles qui selon lui doit s’effectuer par redéploiement. Enfin, le rapport parle plusieurs fois de « meilleure utilisation » des moyens disponibles.

Rééquilibrage des voies et des filières Le rapport Descoings reconnaît assez clairement la mauvaise image dont souffrent le lycée professionnel et certaines filières du lycée général, mais il en conserve l’architecture en tentant de la réformer : Revalorisation des filières de la voie générale les unes par rapport aux autres. La Filière S ne doit plus être une filière d’élite, choisie pour des raisons sociales ou de débouchés plus ouverts. L’orientation ne doit plus être autant subie mais choisie.

Les 3 voies : de même, il faut revaloriser les voies professionnelle et technologique qui ont fait leurs preuves et doivent assurer une insertion professionnelle aux jeunes. S’ensuit une remarque intéressante : « Tout projet de réforme du lycée doit présenter d’un même mouvement et le lycée général et technologique et le lycée professionnel ». Mais le lycée professionnel est à peine évoqué et la réforme du Bac Pro est entérinée sans commentaire.

« L’égale dignité des filières passe par une place plus équilibrée de chacune des cultures, généralistes et technologiques, en seconde. » Les moyens pour y parvenir restent vagues sur le rééquilibrage des filières et sur le rapport entre les voies professionnelle et technologique. On ne peut dire si elles seront fusionnées ou si l’une absorbera l’autre.

Le rapport Apparu avance un projet plus « radical » : retour à une seconde indifférenciée avec modules, deux premières (l’une « générale » et l’autre « technologique ») avec une spécialisation forte par filières en Terminale. Au passage filtre la nette volonté de réduire les horaires de « 5 à 8 h ».

Orientation et insertion professionnelle Le rapport Descoings plaide pour une orientation plus « choisie » que « subie » avec notamment un travail d’orientation sur temps scolaire tout au long du lycée,un référent adulte pour chaque lycéen, des stages en entreprise, des partenariats conclus entre lycée et établissements d’enseignement supérieur.

Des liens étroits doivent s’établir entre les établissements et les Régions tenant compte de la situation locale de l’emploi.

Pour Apparu il faut créer un grand service d’orientation au delà du seul public scolaire et régionaliser les missions des actuelles CIO. Descoing reste très discret sur la question.

Apparu annonce ainsi la relance de la régionalisation des services et des personnels d’orientation évitée lors des grèves de 2003. Aucune remarque n’est faite sur les disparités des moyens entre les régions et leur différence de traitement sur la question, qui étaient déjà apparues lors de la régionalisation des TOS.

Les 2 rapports préconisent d’ouvrir plus largement les IUT et les BTS aux élèves des filières technologiques qui sont souvent amenés vers des licences où ils connaissent trop d’échec. Selon Descoings les enseignants du supérieur pourraient enseigner dans le cycle terminal afin de mieux préparer les élèves.

La Seconde et l’orientation : beaucoup d’élèves sont prédéterminés à leur sortie de 3e et la Seconde indéterminée ne l’est donc plus réellement. Elle doit devenir une année d’observation avant le cycle terminal. Si l’organisation de la Seconde en deux semestres est clairement préconisée dans le rapport Apparu, ce n’est pas le cas dans le rapport Descoings qui doute de l’efficacité de la méthode.

Redéfinition du statut des enseignants : temps de travail et des missions Les deux rapports y sont favorables. Mais seul le rapport Apparu développe vraiment ce point.

Un 15H+3 avec 3H heures d’activités pédagogiques hebdomadaires qui pourraient comprendre l’aide au devoir, à l’orientation, les travaux pluridisciplinaires, le travail de recherche et de documentation, voire du tutorat, l’orientation, des stages de remise à niveau durant les vacances encadrées par des enseignants payés en heures supplémentaires…

À terme les agrégés basculeraient dans le supérieur mais dans un premier temps leur obligation de service passerait à 14+3.

Rien n’est dit sur la rétribution de ces heures dites d’accompagnement scolaire : c’est la voie ouverte à la modulation horaire : 1h d’accompagnement pour 1/2h de cours… Ou comment augmenter sans le dire les obligations de service et supprimer des postes.

L’autonomie des établissements Les rapports Descoings et Apparu critiquent la contradiction entre l’autonomie proclamée des établissements et une autonomie budgétaire en constante régression qui ne leur permet pas de choix pédagogiques autonomes.

Tous les deux plaident cependant pour un cadre national de connaissances avec un seuil horaire « minimal » pour chaque discipline chez Apparu. La globalisation des horaires permettrait une « vraie » autonomie.

Descoings se borne à souhaiter plus de souplesses pour la promotion d’initiatives pédagogiques et rappelle que « le maintien du cadre national du baccalauréat est un principe ».

En droite ligne avec la Loi Fillon de 2005, l’autonomie pédagogique et budgétaire apparaît surtout chez Apparu comme le moyen d’alléger les enseignements aux lycée et d’affaiblir leur caractère national. Mais les deux rapports se rejoignent dans la demande d’une évaluation publique des établissements qui impliquerait en fait leur mise en concurrence. C’est d’ailleurs un des aspects les plus critiquables des lycées expérimentaux financés par la fondation Sciences Po.

Publié le dimanche 30 août 2009